Des chercheurs de l’Institut de cardiologie font une découverte génétique

4 mai 2007
Dr. Ruth McPherson, Dr. Robert Roberts and Alexandre Stewart, PhD
Des membres de l’équipe de recherche de l’ICUO : la Dre Ruth McPherson, le Dr Robert Roberts et Alexandre Stewart, Ph. D., dont les recherches ont mis au jour un lien entre la génétique et la maladie du coeur.

Les chercheurs de l’Institut de cardiologie de l’Université d’Ottawa (ICUO) ont identifié la partie d’une séquence d’ADN responsable d’une augmentation allant jusqu’à 40 p. 100 de la susceptibilité aux maladies du coeur, sans égard aux autres risques connus tels que le taux de cholestérol, la tension artérielle et le diabète. Cette découverte pourrait permettre de repérer les personnes qui présentent un risque élevé de maladie du coeur à long terme et d’abaisser ce risque en leur offrant un traitement préventif précoce comprenant un changement du mode de vie et la prise de médicaments. En outre, ces résultats pourraient permettre une meilleure compréhension des voies biologiques qui mènent aux crises cardiaques.

Dans une étude dirigée par la Dre Ruth McPherson, directrice de la Clinique des lipides et du Laboratoire de recherche sur les lipides de l’ICUO, en collaboration avec le Dr Jonathan Cohen de l’École de médecine de l’Université Southwestern du Texas, on a examiné l’ADN de patients cardiaques et de sujets témoins en bonne santé de la région d’Ottawa. Les sujets participaient à l’étude de génomique de l’ICUO (Ottawa Heart Genomics Study), dans le cadre de laquelle l’ADN de 1 300 patients et de 1 500 sujets témoins en bonne santé a fait l’objet d’un examen à la recherche de variations génétiques. Les chercheurs de l’Institut de cardiologie ont ensuite travaillé en collaboration avec des scientifiques responsables de plusieurs autres études de grande envergure portant sur les maladies du coeur, menées aux États-Unis et au Danemark, dans le but de comparer leurs résultats.

Les données publiées dans la revue Science Express (en anglais seulement) montrent que ces variations compteraient pour environ un cinquième du nombre de crises cardiaques chez les occidentaux d’origine européenne et pour près d’un tiers dans les cas d’apparition précoce de la maladie. Les chercheurs ont pointé du doigt un facteur de risque génétique parmi les plus influents dans la survenue des crises cardiaques jamais découverts; ils ont ainsi ouvert la voie à la mise au point d’un test de dépistage visant à repérer les individus à risque et de nouveaux traitements.

Les recherches ont été menées par deux groupes indépendants de chercheurs; elles pourraient aider les scientifiques à comprendre les raisons pour lesquelles certaines personnes souffrent d’une maladie du coeur en l’absence de facteurs de risque courants.

Les résultats reposent sur l’analyse d’échantillons prélevés chez plus de 23 000 sujets au Canada, aux États-Unis et au Danemark. Soit 2 765 personnes provenant de la région d’Ottawa, 10 578 hommes et femmes d’origine danoise recrutés dans l’étude de Copenhague (Copenhagen City Heart Study) et 11 478 femmes et hommes recrutés aux États-Unis dans l’étude ARIC (Atherosclerosis Risk in Communities) et l’étude de Dallas (Dallas Heart Study). Dans ces trois études de validation, le lien entre la mutation génétique en cause et les coronaropathies est significatif.

Anna Helgadottir de la société deCODE genetics, dont le siège est situé à Reykjavik en Islande, et ses collègues américains de l’Université Emory d’Atlanta, de l’Université de Pennsylvanie et de l’Université Duke en Caroline du Nord ont évalué 17 000 sujets.

Les deux groupes de chercheurs ont obtenu des résultats similaires.

« Cette découverte est importante pour plusieurs raisons, indique la Dre McPherson. Cette mutation génétique courante a un effet marqué sur le risque de maladie du coeur, effet qui est indépendant des autres facteurs de risque que nous connaissons déjà. Dans les pays occidentaux, les décès sont en grande partie attribuables aux maladies du coeur. Chez les hommes, le risque de cardiopathie à un moment donné de la vie est d’environ 1 sur 2, alors qu’il est de 1 sur 3 pour les femmes. Outre les facteurs de risque connus, le fait d’arriver à identifier les facteurs génétiques qui influent sur la maladie nous permettrait de repérer plus efficacement les individus qui profiteraient au maximum d’une intervention précoce visant à réduire le risque de maladie. »

Le haut du graphique représente un brin d’ADN; on y voit les marqueurs qui balisent la piste génétique de la maladie. La moitié inférieure de l’image représente une partie de la micropuce contenant le matériel génétique humain.

L’équipe scientifique de recherche de l’Institut de cardiologie est formée de la Dre McPherson, endocrinologue et biologiste moléculaire, du Dr Robert Roberts, président-directeur général de l’ICUO, lequel est à la fois cardiologue et généticien, et d’Alexandre Stewart, Ph. D., chercheur principal au Centre canadien de recherche en génétique cardiovasculaire Ruddy.

« Cette étude a levé le voile sur les prédispositions génétiques aux cardiopathies, tant et si bien que nous pourrons bientôt mettre sur pied des traitements individualisés, déclare le Dr Roberts. Les connaissances scientifiques actuelles fournissent d’excellents outils pour lutter contre les facteurs environnementaux comme l’obésité, mais l’influence des gènes sur la maladie du coeur demeure floue. À l’Institut de cardiologie, nous nous intéressons précisément à ces questions. »

L’Institut de cardiologie utilise le système d’analyse ultraperfectionné GeneChipMC d’Affymetrix, qui permet d’analyser un nombre considérable d’échantillons et d’identifier les gènes; les chercheurs peuvent ainsi mettre en évidence des profils d’expression génique. L’étude de génomique de l’ICUO est considérée comme la première étude du génome entier visant à rechercher les gènes de la maladie coronarienne à l’aide d’un nombre extrêmement élevé de marqueurs génétiques (500 000). De ce fait, on s’attend à en découvrir davantage sur les causes génétiques des coronaropathies.

Dans le cadre de cette étude, on a recruté des hommes âgés de plus de 65 ans et des femmes âgées de plus 70 ans ne présentant aucun signe ni antécédent de maladie coronarienne. Les patients retenus pour participer à l’étude souffraient quant à eux de maladie coronarienne précoce grave; les sujets présentant un diabète ou une hypercholestérolémie très élevée n’ont pas été retenus.