Cannabis : il pourrait vous briser le cœur

11 juin 2019
Image décorative
La consommation de cannabis peut accélérer la fréquence cardiaque au repos, dilater les vaisseaux sanguins et… possiblement entraîner le syndrome du cœur brisé.

Alors que certains affirment que la marijuana est inoffensive, d’autres rappellent que ses risques et avantages à long terme n’ont pas encore été suffisamment étudiés. L’une des seules choses que nous savons pour l’instant est que le cannabis a des effets notables sur le cœur, et que ceux-ci peuvent parfois entraîner des problèmes comme une crise cardiaque, de l’arythmie ou un AVC.

Le cannabis est une plante très complexe, qui contient plus de 400 composantes chimiques. Parmi ses effets sur le système cardiovasculaire, on sait que le cannabis accélère la fréquence cardiaque au repos, dilate les vaisseaux sanguins et fait travailler davantage le cœur.

Bien que ces effets ne représentent généralement pas une menace importante pour les individus en santé ayant des risques cardiovasculaires faibles, ils peuvent poser problème aux personnes ayant des antécédents cardiovasculaires ou présentant des risques élevés de complications cardiaques.

Le Dr Paul Oh (à gauche) est photographié en compagnie de Dahlia Kurtz avant l’enregistrement de leur entrevue radiophonique. L’entrevue a été diffusée lors d’un épisode de l’émission The Goods with Dahlia Kurtz, sur la chaîne CFRA 580 News Talk Radio.

« Si vous êtes âgé ou si vous souffrez de problèmes cardiaques, votre capacité à supporter un changement soudain de fréquence cardiaque, de tension artérielle ou d’arythmie est déjà réduite », rappelle le Dr Paul Oh, détenteur de la chaire GoodLife Fitness, directeur médical du programme de réadaptation cardiaque du Réseau universitaire de santé et professeur agrégé de pharmacologie clinique à l’Université de Toronto. « L’hospitalisation pour un malaise cardiaque lié à la consommation de marijuana n’est pas rare dans ce type de cas. »

Alors que l’usage récréatif et médicinal de la marijuana est de plus en plus populaire au Canada et ailleurs, les signalements liant cette substance à des cas de crise cardiaque, d’arythmie, d’insuffisance cardiaque, d’AVC et d’arrêt cardiaque chez de jeunes individus en santé sont en hausse.

L’usage du cannabis semble particulièrement accroître les risques de développer le syndrome de tako-tsubo, une dysfonction rare où le muscle cardiaque se gonfle soudainement, ce qui l’affaiblit et réduit sa capacité à pomper le sang. Bien que ce syndrome (aussi appelé syndrome du cœur brisé) touche habituellement les femmes âgées, l’usage du cannabis favorise son développement chez les jeunes hommes.

« Aux États-Unis, où l’usage médical de la marijuana est légal dans 28 états, de plus en plus de jeunes hommes en santé vont à l’urgence en raison de crises cardiaques qui semblent être associées à l’usage récent du cannabis », souligne le Dr Oh, qui a récemment discuté des effets du cannabis sur le cœur lors du Toronto-Ottawa Heart Summit, qui s’est tenu en même temps que la 7e Conférence d’Ottawa sur la cardiologie : Données massives et maladies cardiovasculaires. « Nous ne comprenons pas pourquoi cela se produit. Espérons que les recherches à venir nous aideront à mieux comprendre pourquoi le cannabis semble accroître les risques de syndrome de tako-tsubo chez les jeunes hommes. »

Avec la libéralisation de la marijuana – notamment la légalisation des aliments aux cannabis au Canada à l’automne 2019 – des recherches scientifiques de meilleure qualité viendront étoffer la littérature médicale sur les effets de la marijuana sur la santé cardiaque. D’ici là, les experts comme le Dr Oh soulignent qu’il est essentiel de mieux sensibiliser le public aux risques cardiovasculaires associés à l’usage du cannabis.

L’ensemble de la société entre en territoire inconnu.

-Dr Peter Liu, directeur scientifique et vice-président de la recherche, Institut de cardiologie de l’Université d’Ottawa.

« L’ensemble de la société entre en territoire inconnu », explique le Dr Peter Liu, directeur scientifique et vice-président de la recherche à l’Institut de cardiologie de l’Université d’Ottawa. « Nous devons collaborer afin de clarifier plusieurs questions, dont les effets indésirables que peut avoir le cannabis lorsque consommé seul ou en combinaison avec des médicaments. »

« Établir un dialogue franc et ouvert entre les médecins et leurs patients est un bon point de départ, ajoute-t-il. Si le cannabis ne faisait pas déjà partie de ce dialogue, il devrait désormais en faire partie. »