Un grand jour dans le monde de la transplantation cardiaque

13 décembre 2012
N’eût été la modestie – et la grande fatigue – de toute l’équipe, vous auriez sûrement eu vent des célébrations qui ont marqué la vie de l’Institut de cardiologie de l’Université d’Ottawa (ICUO) le mois dernier.
Le 23 novembre 2012, des chirurgiens de l’Institut de cardiologie de l’Université d’Ottawa ont pratiqué la 500e transplantation cardiaque depuis que le programme a vu le jour en 1984.

Car l’occasion de célébrer était grande; l’Institut de cardiologie venait en effet de réaliser sa 500e transplantation cardiaque depuis 1984. Mais aussi sa 499e… Et sa 498e! En fait, 2 records ont été établis les 22 et 23 novembre – non seulement le passage du cap des 500 transplantations, mais aussi la réalisation de 3 transplantations en seulement 24 heures, dont 2 se sont même chevauchées grâce au travail en parallèle de 2 équipes complètes de chirurgie.

« Ce fut un grand moment d’allégresse pour nous tous », affirme le Dr Marc Ruel, un des chirurgiens qui a pris part à cette journée unique.

Il s’amuse à comparer la transplantation à une véritable fête. « Vous prenez un vieux cœur abimé qui ne fonctionne plus et vous le remplacez par un nouveau, habituellement plus jeune, explique-t-il. C’est comme un cadeau de Noël pour le patient. Et pour nous, c’est une fantastique décharge d’adrénaline. »

Le patient qui a reçu la 500e transplantation cardiaque se trouvait déjà à l’hôpital dans l’attente d’un cœur quand il a appris qu’un organe était disponible. Au courant de l’approche du grand événement, il avait même avoué au personnel qu’il pressentait qu’il serait le 500e greffé du cœur. « Il incarne en quelque sorte tous les patients transplantés que notre établissement a eu le bonheur de traiter », résume le Dr Ruel.

Le Dr Ruel réalise des transplantations cardiaques à l’Institut de cardiologie depuis plus de 10 ans. « Les techniques que nous employons n’ont pratiquement pas évolué, explique-t-il. Les interventions que nous avons réalisées les 22 et 23 novembre étaient très semblables à la toute première greffe du cœur réalisée au Canada, en 1968. Ce qui a changé, c’est notre compréhension du cœur et de son fonctionnement. Ces connaissances ont entraîné des améliorations notables en ce qui a trait à l’anesthésiologie, à l’immunosuppression (une nécessité pour éviter un rejet par l’organisme du nouvel organe), au traitement et au processus de réadaptation après l’opération. »

Les recherches menées par le Dr Ruel ont mis en lumière le poids de ces avancées réalisées hors des salles d’opération. L’an dernier, il a en effet dévoilé les résultats d’une étude de suivi de tous les patients ayant subi une transplantation cardiaque à l’Institut de cardiologie depuis 1984. Avec ses collègues, il a démontré que le taux de survie après une transplantation cardiaque a augmenté de plus de 20 p. 100 avec les années, et plus particulièrement à partir de 2003. Lui et ses collègues ont ainsi découvert que près de 90 p. 100 des patients transplantés depuis cette époque étaient toujours en vie 8 ans après leur intervention. « Et ces résultats, qui surpassent à peu près tous les chiffres publiés jusque-là, témoignent de l’excellence des soins offerts par l’équipe de transplantation de l’Institut de cardiologie », précise le Dr Ruel.

Lui-même estime que son rôle dans l’équipe est plutôt minime. « Cette augmentation du taux de survie est essentiellement attribuable aux cardiologues et à l’équipe multidisciplinaire; ce sont eux qui ont la responsabilité de prendre soin des patients atteints d’insuffisance cardiaque avant que ceux-ci ne soient admissibles à une transplantation et qui assurent leur prise en charge après l’intervention », indique-t-il.

Le Dr Haissam Haddad est cardiologue, directeur du Programme d’insuffisance cardiaque et directeur médical du Service de transplantation cardiaque de l’Institut de cardiologie de l’Université d’Ottawa. Son équipe assure le suivi des patients pendant parfois jusqu’à 10 ans avant une transplantation et pour le reste de leur vie par la suite. Seulement durant l’année qui suit la greffe, il réalise de 10 à 12 biopsies sur les patients pour rechercher des signes de rejet, de façon à intervenir rapidement au besoin.

« Nous avons des relations très particulières, confie le Dr Haddad. Nous voyons ces personnes très souvent. Nous les connaissons, nous savons quand elles ne vont pas bien. Nous souffrons avec elles et nous célébrons avec elles. »

Jackie Grenon acquiesce. Infirmière de pratique avancée, Mme Grenon est coordonnatrice du Programme de transplantations, la cellule qui réunit médecins, chirurgiens, diététistes, travailleurs sociaux, pharmaciens, infirmières, physiothérapeutes et tous les autres professionnels de la santé qui travaillent de pairs pour aider les patients atteints d’insuffisance cardiaque à survivre et à demeurer en santé. Elle explique que les patients et les soignants forment une grande famille. Des propos corroborés par l’ambiance de fête qui marque la réception visant à célébrer ce grand jour; membres du personnel et patients transplantés se donnent l’accolade et prennent des nouvelles les uns des autres. Les liens chaleureux qui les unissent sont tangibles.

À la réception, Daniel Shipman, un greffé du cœur, a déclaré : « Vous nous avez permis de poursuivre notre vie auprès de nos familles et de nos amis, et vous faites maintenant partie des leurs. »

Selon le Réseau Trillium pour le don de vie, l’agence ontarienne sans but lucratif qui coordonne les dons d’organes, 67 Canadiens sont en attente d’une transplantation cardiaque. Une attente qui peut durer des jours ou des mois selon la disponibilité des organes et les besoins des patients. En 1984, le Dr Wilbert Keon, chirurgien et fondateur de l’Institut de cardiologie, réalisait la première transplantation cardiaque de l’Institut de cardiologie. Aujourd’hui, 30 interventions de ce type sont réalisées chaque année à l’Institut de cardiologie, lequel compte parmi les hôpitaux chefs de file en transplantations cardiaques au Canada.