Entretien avec la Dre Thais Coutinho sur la prévention de la maladie du cœur et la réadaptation cardiaque

29 mai 2017

La Division de prévention et de réadaptation de l’Institut de cardiologie de l’Université d’Ottawa offre des programmes de mieux-être éprouvés, de réadaptation cardiaque pour les patients internes et externes et pilote le Modèle d’Ottawa pour l’abandon du tabac et un programme de recherche actif.

Le 1er mai 2017, la Dre Thais Coutinho a pris les rênes de la Division de prévention et de réadaptation, devenant ainsi la première femme à occuper le poste de chef de division à l’Institut. La Dre Coutinho a également assumé le rôle de directrice du Centre canadien de santé cardiaque pour les femmes de l’Institut de cardiologie.

Elle a succédé au Dr Andrew Pipe, qui avait dirigé la division pendant onze années et qui demeurera toutefois avec l’équipe à titre de médecin et de chercheur principal. The Beat s’est entretenu avec la Dre Coutinho pour parler de ses intérêts dans le domaine et de ses plans pour les cinq prochaines années.

Thais Coutinho, MD. Chief, Division of Prevention and Rehabilitation
Dre Thais Coutinho, chef, Division de prévention et de réadaptation

The Beat : À titre de cardiologue ayant travaillé précédemment en santé vasculaire et en biologie, est-ce que passer à la prévention et à la réadaptation était quelque chose que vous envisagiez pour votre carrière auparavant?

Dre Coutinho : Tout à fait. Pendant ma formation, c’était dans ces domaines que j’ai passé le plus clair de mon temps. J’ai toujours eu un attrait pour les aspects cliniques. Les maladies cardiovasculaires sont les deuxièmes plus importantes causes de décès au Canada et nous savons que 80 % de ces maladies auraient pu être évitées. C’est pourquoi les efforts de prévention sont si importants. Nous pouvons empêcher les gens de devenir malades. C’est une approche qui demande beaucoup moins de ressources que de traiter la maladie!

The Beat : Que comptez-vous accomplir comme chef de division?

Dre Coutinho : Tout d’abord, je veux continuer à cultiver tout ce qui a fait de cette division un si grand succès jusqu’ici. La Division a connu beaucoup de succès; je pense notamment au Modèle d’Ottawa pour l’abandon du tabac. Je veux m’assurer que ces programmes géniaux vont de l’avant et continuent de croître.

Pour ce qui est de nouveaux programmes éventuels, j’aimerais inciter les patients atteints de la maladie artérielle périphérique (MAP) à se joindre à nos programmes de prévention et de réadaptation. Ces patients sont ceux qui présentent le plus de facteurs de risque. Malgré cela, ils ont une moins grande capacité à contrôler ces facteurs de risque par rapport aux patients atteints de maladies coronariennes, par exemple. De plus, ils ont de la difficulté à marcher en raison de douleurs aux jambes : leur qualité de vie est donc sévèrement réduite.

J’aimerais visiter un centre aux États-Unis qui offre des services de réadaptation pour la MAP, ou encore inviter un expert qui pourrait nous donner des conseils, car on doit faire les choses différemment qu’avec les autres patients cardiaques. Ces patients ont des besoins différents et leur capacité à faire de l’exercice est plus faible. On sait qu’on peut les aider, mais on doit trouver la meilleure façon de procéder.

L’autre groupe sur lequel j’aimerais axer mes efforts : les femmes. Le taux de participation des femmes au programme de réadaptation de l’Institut est de 20 %, 25 % quand on est chanceux. Et nous ne sommes pas les seuls : les autres centres affichent des taux semblables. Les femmes n’ont pas tendance à participer à ces programmes. On veut savoir pourquoi et corriger le tir. Lorsqu’on en saura plus, on pourra trouver un système qui les convaincra davantage de participer. Si le problème est la nature du programme offert, on pourra alors leur offrir un programme sur mesure pour elles.

Le Centre de santé cardiaque pour les femmes constitue une ressource formidable. On espère continuer à améliorer nos services de prévention grâce à ce centre. Par exemple, les femmes atteintes de prééclampsie pendant leur grossesse présentent un risque entre deux à cinq fois plus élevé de subir une crise cardiaque ou un AVC plus tard au cours de leur vie, selon l’intensité de la prééclampsie. De plus, ces événements cardiaques se produisent tôt : l’âge moyen de la première crise cardiaque ou du premier AVCest de 38 ans. Ces femmes ne s’inscrivent d’habitude pas à des programmes de prévention. Plusieurs d’entre elles ne savent même pas qu’elles présentent un risque accru de crises cardiaques ou d’AVC – et c’est d’ailleurs trop souvent vrai pour leur médecin. On aimerait commencer à combler les lacunes à cet égard.

The Beat : Quel est votre point de vue sur l’avenir de la recherche en prévention et en réadaptation dans la Division?

Dre Coutinho : C’est une partie intégrante de tout ce que nous faisons. C’est grâce à la recherche que l’on s’améliore et que l’on trouve de nouveaux traitements pour les patients. Le Modèle d’Ottawa pour l’abandon du tabac a débuté avec un projet de recherche. Il est aujourd’hui un important programme clinique qui a influencé les pratiques cliniques partout dans la province et au pays. Nous voulons absolument continuer à faire de la recherche, ça, c’est certain.

Mon champ d'intérêt en recherche est l'évaluation de la santé vasculaire. Je pense que l’on pourrait utiliser des méthodes non invasives en clinique pour mieux classifier les niveaux de risque. On ne fait pas encore ça. Depuis le tout premier Sommet canadien sur la santé des femmes, un réseau de recherche national a été formé avec la collaboration de la Fondation des maladies du cœur et de l’AVC. On veut établir un partenariat avec eux pour avoir un meilleur impact sur la santé des femmes.

The Beat : Quelles sont vos impressions de la division jusqu’ici?

Dre Coutinho : C’est extraordinaire de pouvoir arriver dans une division comme celle-ci, déjà reconnue pour ses succès! Au cours des onze dernières années, le Dr Pipe a dirigé de façon exemplaire cette division vers de nouveaux sommets. Je peux vous dire sans réserve qu’il s’agit aujourd’hui du meilleur centre de prévention et de réadaptation au pays. D’une certaine manière, ça rend mon travail plus difficile : je dois m’assurer que les succès de la division feront boule de neige. Mais à voir les gens fabuleux qui travaillent dans cette division – ils adorent vraiment ce qu’ils font – je n’ai aucun doute que l'on continuera à connaître du succès et à améliorer la santé cardiovasculaire de notre collectivité.

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