Le Guide alimentaire canadien : de bonnes idées à mijoter

19 mars 2019
Le Guide alimentaire canadien : de bonnes idées à mijoter

Lors de sa récente mise à jour – la première en plus de dix ans –, le Guide alimentaire canadien a mis les groupes alimentaires et les portions au rancart. Le message aux Canadiens est on ne peut plus clair : privilégiez les protéines d’origine végétale, et mangez moins de viande et de produits laitiers.

Kathleen Turner, diététiste professionnelle à la Division de prévention et de réadaptation cardiaque de l’Institut de cardiologie de l’Université d’Ottawa (ICUO), est bien d’accord avec ce message. Selon elle, le nouveau guide va dans le sens de la recherche scientifique et met l’accent sur les aliments et les nutriments.

« Je pense qu’ils ont fait beaucoup de bons coups cette fois-ci », a dit Mme Turner en entrevue à CTV avec Graham Richardson. « Le guide aborde non seulement le choix des aliments – quoi manger –, mais aussi les habitudes alimentaires – comment manger. »

Kathleen Turner est diététiste professionnelle à la Division de prévention et de réadaptation cardiaque de l’Institut de cardiologie de l’Université d’Ottawa et l’auteure d’une recette de latte épicé à la citrouille à se rouler par terre.

Les recommandations visant le choix des aliments sont assez simples. Comme ils sont riches en fibres, vitamines, minéraux et autres éléments nutritifs importants, les légumes et les fruits devraient occuper la moitié de votre assiette. Les aliments protéinés comme les œufs, la viande maigre, la volaille, le poisson, les noix et les graines, quant à eux, devraient occuper un quart de l’assiette. Ce groupe comprend aussi les produits laitiers, qui ne forment plus un groupe à eux seuls.

« C’est ce que nous recommandons aux gens depuis longtemps, a dit Kathleen Turner. Nous savons que le risque de maladie cardiovasculaire et de diabète est moindre chez les personnes qui privilégient les protéines d’origine végétale, une habitude qui aide aussi à abaisser la tension artérielle et le cholestérol... »

« Le guide n’essaie pas de vous convertir au végétarisme ou de vous empêcher de consommer de la viande et des produits laitiers, mais recommande simplement d’en manger moins souvent et de privilégier les protéines d’origine végétale et le poisson. »

Le dernier quart de l’assiette devrait être consacré aux céréales complètes comme le quinoa, l’avoine, le riz ou les pâtes et les pains complets.

La modification de l’alimentation, rappelle Mme Turner, peut se faire graduellement. « Si vous n’avez pas l’habitude de manger des aliments protéinés d’origine végétale, commencez par les intégrer à un repas par semaine, dans des plats composés comme une soupe ou un chili. »

Les habitudes alimentaires, comme prendre le temps de manger et de savourer ce qu’on mange, font aussi partie de l’équation, car elles aident à prendre conscience des quantités qu’on consomme.

« Il est important de manger en pleine conscience en toutes circonstances », explique Rozen Alex, Ph.D., psychologue en réadaptation cardiaque à l’ICUO. « Même quand on mange seul, il est important de faire des repas un moment spécial. » Elle recommande de dresser la table, de s’asseoir pour manger, de limiter les distractions et même de mettre de la musique au lieu de s’écraser devant le téléviseur.

Même s’il a été généralement bien accueilli par les médecins et professionnels de la santé, le nouveau guide ne fait pas l’unanimité.

Dans un billet de blogue, Nazima Qureshi, une diététiste professionnelle qui travaille auprès des femmes musulmanes, indique que le guide, qui met surtout en valeur des légumes eurocentriques archiconnus comme le brocoli, les carottes et les épinards, ne reflète pas le multiculturalisme canadien.

« Oui, la section des aliments protéinés comprend des pois chiches et des lentilles, mais ils sont détachés de leur contexte culturel, écrit-elle. Où sont le gombo, l’aubergine, le bok choy et les autres légumes que les communautés ethniques utilisent pour cuisiner? »

– Nazima Qureshi

Mme Qureshi reconnaît que le guide est une bonne ressource et un bon point de départ pour aborder la saine alimentation. Elle croit cependant que ce guide, vu sa portée nationale, aurait pu « vraiment représenter le Canada et ses valeurs. Le Canada étant un pays multiculturel, je crois qu’on a manqué notre coup en ne répondant pas aux besoins de tous ceux qui veulent manger sainement. »

Le diététiste spécialiste de nutrition sportive Ben Sit fait écho aux arguments de Mme Qureshi et d’autres observateurs dans son propre billet de blogue

En entrevue à CTV News, la ministre de la Santé du Canada, Ginette Petitpas-Taylor, a dit : « Il faut comprendre que le Canada compte plus de 37 millions de personnes, dont beaucoup viennent de cultures différentes et ont des habitudes alimentaires différentes [...] Nous nous sommes basés sur les meilleures données scientifiques pour vraiment répondre aux besoins de tous les Canadiens. »

Il sera intéressant de suivre la saga du Guide alimentaire canadien au cours des prochains mois, car d’autres développements sont à venir. La dernière édition du guide est un pas dans la bonne direction, mais, de toute évidence, on a encore du pain sur la planche. 

Article suggéré :

Lisez la lettre ouverte sur le guide alimentaire rédigée par le Dr Andrew Pipe et Yves Savoie (chef de la direction de la Fondation des maladies du cœur et de l’AVC) publiée dans le Hamilton Spectator dans la foulée de la Stratégie de Santé Canada en matière de saine alimentation.